Cathédrale du Mans | Notre Dame de la Couture

1er Dimanche de l’Avent

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Le temps du désir

1er dimanche de l’Avent. Le temps de l’Avent aiguise notre désir de Dieu…où en sommes-nous? Un commentaire du Père Marcel Domergue, sj

La foi au Christ engendre aussitôt une  » religion  » du désir. Elle nous tourne en effet vers l’avenir, vers ce qui vient; vers celui qui vient. Devant ce qui se passe dans le monde, certains se débrouillent pour se mettre à l’abri des coups en se glissant dans une situation privilégiée; les disciples du Christ refusent cette évasion.

D’autres se révoltent et recourent à la violence; les disciples du Christ savent que c’est là multiplier le malheur initial. Bien d’autres manières de s’esquiver pourraient être énumérées, la foi chrétienne les refuse toutes. Elle se situe aux antipodes de la résignation et tourne sans cesse notre regard vers la puissance qui nous fait exister. Nous attendons et désirons la venue de la Vie. Le Livre de la Première Alliance est plein de cette espérance, qui s’exprime souvent par des plaintes, des cris d’appel, des injonctions vigoureuses à ce Dieu qui tarde trop. Tout cela se récapitule dans l’attente du Royaume de Dieu. Dans la Nouvelle Alliance, cette prise de pouvoir par Dieu s’exprime dans le thème du retour, ou plutôt de l’ultime venue du Christ. Nous voici donc tournés vers l’avenir, vers Celui qui vient. À première vue, plusieurs questions se posent: si nous attendons  » l’intervention de Dieu « , avons-nous encore quelque chose à faire? N’y a-t-il pas dans cette attente quelque chose de mythique? Une sorte de  » deus ex machina  » ? Essayons d’y voir plus clair.

La venue du Christ au présent

Tout d’abord il faut conjuguer notre texte avec d’autres paroles de Jésus, par exemple quand il nous dit que le Royaume de Dieu est déjà là, qu’il est en nous, ou parmi nous, ou entre nous (Matthieu 5; 12,28. Luc 17,20-21 … ). De même que nous sommes déjà enfants de Dieu sans que cela soit encore manifesté, de même le Royaume est là dès que règne entre nous l’amour tel que le Christ l’a vécu. Il est illusoire de dire, comme on l’entend souvent, que nous avons à faire, ou à construire, le Royaume de Dieu: la venue du Christ est un don mais nous avons le pouvoir de le recevoir et de le transmettre: l’amour qui nous vient de Dieu, qui est Dieu, peut nous traverser pour aller vers les autres. Donc, le Royaume de Dieu, qui se confond avec la venue du Christ, est à l’oeuvre depuis le commencement, jusqu’à la fin qui le révélera en pleine lumière. Alors nous pourrons relire notre vie en fonction de notre accueil du Royaume. Le  » jugement « , qui peut nous faire trembler ou nous laisser sceptiques, c’est cela: nos yeux qui s’ouvrent à la lumière. Heureusement Paul nous dit que  » tout ce qui vient à la lumière devient lumière  » (Éphésiens 5,13?14). Le Christ est donc celui qui est venu, qui vient et qui viendra. Le temps de l’Avent vient nous redire tout cela pour que nous restions conscients du mystère qui nous enveloppe, de cette présence qui sans cesse se rend à nouveau présente, toujours nouvelle et inopinée.

L’attente et la rencontre permanentes de Dieu

Si nous ne devons pas croire ceux qui nous disent « Il est ici; il est là », c’est parce qu’il est partout; « de l’Orient à l’Occident ». Il vient à notre rencontre dans nos joies, nos peines, nos pério des vides. Chaque fois que nous l’accueillons, nous entrons dans le Royaume. Faut-il répéter qu’il nous vient par les autres, et que si ce Royaume est  » entre nous « , c’est parce qu’il réside dans la qualité des liens que nous pouvons nouer avec eux? Nous pouvons à cet égard relire Matthieu 25,31-46, en interprétant la fin inquiétante de ce texte à la lumière d’Éphésiens 5,1314, déjà cité. On le sait, le Nouveau Testament véhicule deux lignes, deux traditions contradictoires, l’une qui annonce le pardon pour tous, y compris les bourreaux (relire les récits de la Passion), l’autre qui reconduit les antiques malédictions pour les « injustes ». À mon avis, c’est quand même la Pâque qui dit le dernier mot: « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font. » De toute façon l’Évangile nous prescrit une attente et un désir permanents, cette aspiration à aller au delà de ce qui fait notre vie déjà là, avec la certitude que Dieu sans cesse vient nous habiter. Saint Augustin explique que ce désir n’a pas besoin d’être conscient, mais qu’il peut et doit être sous-jacent à toutes les occupations que l’existence nous impose. Heureux, dit Jésus, ceux que le maître, à son retour, trouvera occupés à leur tâche, une tâche qui doit être déjà reçue et vécue comme un don de Dieu.

Source : Site, Croire