C’est au cœur de la plus belle cathédrale de France que l’émission Dimanche en Politique consacré à l’Église catholique a installé ses caméras. La cathédrale Saint-Julien du Mans vient en effet d’obtenir ce titre lors d’un concours sur les réseaux sociaux.
À quelques jours de Noël, que représente aujourd’hui le catholicisme dans les Pays de la Loire ? Maxime Jaglin fait le point sur la question avec ses invités :
- Jean-Pierre Vuillemin – Évêque du Mans
- Corinne Valasik – Professeure de sociologie des religions à l’Institut Catholique de Paris
Une baisse des pratiques religieuses
Selon l’INSEE, 29 % des Français se déclarent catholiques, mais seulement 8 % des catholiques vont régulièrement à l’église. Des chiffres en baisse, un constat que partage Corinne Valasik, professeure de sociologie des religions à l’Institut Catholique de Paris.
Un constat que tempère le nouvel Évêque du Mans, Jean-Pierre Vuillemin : « on remarque que l’on passe d’un catholicisme de tradition à un catholicisme davantage d’adhésion« . Pour lui, la religion se vit et se pratique de manière très variée : « il y a une grande diversité dans toutes ces appartenances, on constate que l’Église est très diverse« . Il précise que s’il existe dans les paroisses un noyau très pratiquant, certains fidèles ne pratiquent qu’aux grands moments de la vie comme Noël, les baptêmes ou les obsèques.
L’Ouest, une terre de religion ?
Les Pays de la Loire sont une terre historiquement très croyante, alors l’église de l’Ouest résiste-t-elle à cette baisse du nombre de ses fidèles ?
On observe l’émergence d’un courant plus traditionaliste, notamment dans les centres-villes d’Angers ou de Nantes, avec des messes en latin, des processions sur l’espace public et le refus de tout progressisme. L’Évêque du Mans appelle à la prudence pour éclairer ce phénomène.
Les abus sexuels dans l’Église
L’Église a vécu ces dernières années un séisme avec le rapport Sauvé et ces chiffres édifiants : plus de 300 000 victimes d’abus sexuels, au moins 3 000 agresseurs depuis 1950. Le rapport évoque un phénomène « massif et systémique ».
Il y a quelques jours, des victimes originaires d’Issé en Loire-Atlantique ont obtenu une audience avec le Pape François. Elles ont été violées dans les années 60 par des religieux de la congrégation vendéenne Saint-Gabriel. Une première et une rencontre historique pour ces victimes.
Cette reconnaissance suprême du Pape est plus qu’un symbole. Car si beaucoup de ces prêtres sont maintenant décédés, cette écoute et cette reconnaissance sont importantes pour les victimes. Jean-Pierre Vuillemin, l’Évêque du Mans, témoigne que « les victimes sont reconnaissantes simplement d’être écoutées et que l’on prenne au sérieux leur récit, de casser ainsi une mécanique du silence. »
Le temps de la réparation
Le rapport Sauvé a été un révélateur pour la société, mais aussi pour l’Église. Elle doit aujourd’hui faire face et trouver les termes de la réparation… des réparations.
Nous sommes dans des apprentissages nouveaux, collectivement. C’est toute une société qui doit apprendre à casser ces mécaniques de silence. Et dans l’Église, nous faisons ces apprentissages-là. Ça passe par l’accueil, l’écoute.
Jean-Pierre Vuillemin
Évêque du Mans
La réparation passe aussi par des indemnisations financières. Or, aujourd’hui, seulement 2 000 dossiers sont en cours d’instruction sur les 300 000 victimes révélées par le rapport Sauvé.
Pour Corinne Valasik, professeure de sociologie des religions à l’Institut Catholique de Paris, ce décalage s’explique de plusieurs manières. Et l’une des premières explications, c’est un souci de temporalité. Beaucoup de victimes se sont libérées de ce secret quand les parents sont décédés, d’autres ne sont plus là, ou ne sont plus en capacité de déclencher une procédure.
Et puis, il y a ceux qui ne peuvent pas, qui ne veulent pas. « D’autres n’ont ni la volonté, ni le courage, et il n’y a aucun jugement derrière cela, car cette approche n’est pas possible. Et tous ceux qui sont victimes d’une mémoire traumatique. Parce que parler n’est pas magique, cela ne guérit pas. Et quand on parle, on se rend parfois compte que d’autres étaient au courant et que vous n’étiez pas protégé. Et donc c’est un autre effet, c’est un autre espace de déflagration qui est presque aussi violent et qui peut aussi expliquer pourquoi certains n’empruntent pas encore cette voie, en tout cas.«
Des réparations financières de la part de l’Église qui vont de 5 000 à 60 000 euros en fonction du préjudice estimé.
Des mesures de prévention suffisantes ?
Pour éviter que cela se reproduise, il y a besoin d’outils de prévention. Dans certains diocèses, il existe des formations pour parler des abus et de leurs conséquences. Elles sont organisées, pour toutes les personnes qui sont en contact avec les jeunes.
Il y a aussi la mise en place d’un QR code attribué aux prêtres, pour avoir une identité, leur parcours, et savoir s’ils sont autorisés à célébrer ou pas.
Mais est-ce suffisant ?
Jean-Marc Sauvé, ancien président du CIASE (Commission Indépendante sur les Abus Sexuels dans l’Église), juge qu’il manque encore des mesures de prévention au sein de l’Église. Et il y a la nécessité d’aller plus loin collectivement pour Corinne Valasik.
Pour l’Église catholique, le renouveau et l’espoir s’incarnent dans la nouvelle génération.
► Dimanche en Politique « L’Église catholique en quête d’une renaissance », c’est ce dimanche 17 décembre à 11 h 25 sur France 3 Pays de la Loire.
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