Cathédrale du Mans | Notre Dame de la Couture

Méditons la Parole de Dieu avec le Chanoine Sesboüé

2ème Dimanche du carême

Pendant de nombreuses années, les paroissiens ont bénéficié des homélies et enseignements du Chanoine Sesboüé, exégète, ancien professeur au Séminaire et intervenant à la Formation permanente du diocèse. Après son retrait des activités paroissiales il a pris le temps de collecter et relire toutes ses homélies des trois années liturgiques. A partir du temps de l’Avent de cette Année A, chaque dimanche, nous nous réjouissons de méditer avec  lui la Parole de Dieu.

La Transfiguration : une expérience et un appel

 

Depuis des siècles, l’Eglise place devant nos yeux la scène de la Transfiguration de Jésus au deuxième dimanche de Carême. Elle veut ainsi encourager les fidèles dans leurs efforts spirituels par cet événement lumineux qui annonce la Gloire de la résurrection.

 

A la suite du Pape saint Léon le Grand, nous pouvons y discerner une expérience donnée à trois apôtres et un appel pour tout chrétien. Expliquer un passage d’évangile et l’appliquer à notre vie sont les deux exigences d’une lecture fructueuse.

 

  • L’expérience des apôtres

 

« Par cette Transfiguration, » dit saint Léon « il voulait avant tout prémunir ses disciples contre le scandale de la Croix et…empêcher que les abaissements de sa passion volontaire ne bouleversent leur foi ».

Comme tout phénomène mystique, l’expérience donnée aux apôtres de contempler Jésus transfiguré ne peut se décrire en détail. Il s’agit en fait d’une vision accompagnée d’un message. Le terme de « transfigurer » ne désigne pas un changement dans l’être de Jésus mais dans son aspect : la blancheur et la lumière qui l’entourent le présentent comme appartenant au monde divin. A ceux qui étaient bouleversés par la récente annonce de la passion, Jésus se montre dans la force et la gloire de Dieu, les appelant ainsi à lui donner toute leur confiance. Dans leur itinéraire de foi au mystère de Jésus, cette expérience marque  une étape importante. Ils vont accueillir en sa personne, non seulement celui qui est envoyé de Dieu, mais celui qui est tout proche de Dieu, parce qu’il est son Fils. La vision de Moïse et d’Elie, deux prophètes de l’AT, souligne la continuité de l’histoire sainte, dont Jésus est le couronnement. Le sens de la vision est précisé par le message céleste : Dieu présente Jésus comme le Fils qu’il faut écouter.

 

Certes, depuis des mois, les disciples ne cessent d ‘écouter leur maître. Mais ils sont appelés à renforcer cette écoute en résistant à toute tentation de doute pour progresser dans une intelligence profonde de celui qui vient les sauver. Matthieu note la frayeur des disciples devant cette rencontre inopinée. Comme souvent dans l’histoire biblique, l’expérience du divin peut d’abord troubler ceux qui en sont bénéficiaires. Mais Jésus les réconforte : « N’ayez pas peur. » Après cette étape, ils vont se retrouver avec leur maître, dans ce contact quotidien qui les fait vivre : « levant les yeux, ils ne virent plus que Lui, Jésus seul ».

 

2) l’appel aux chrétiens

 

Poursuivant son sermon pour le 2ème dimanche de Carême, saint Léon dit : « il ne prévoyait pas moins de fonder l’espérance de l’Eglise en faisant découvrir à tout le corps du Christ quelle transformation lui serait accordée ».

 

L’expérience apostolique devient un appel pour tout chrétien.

Tout d’abord le message : « Ecoutez-le », concerne évidemment tout disciple de Jésus appelé à se nourrir sans cesse de sa parole. Et nous savons à quel point l’Eglise insiste actuellement sur la nécessité de cette nourriture spirituelle pour la foi des chrétiens.

Mais l ‘événement lui-même de la Transfiguration de Jésus appelle le chrétien à se laisser transfigurer. Saint Léon évoque la Transfiguration radicale qui constitue le passage de la vie terrestre à la vie glorieuse, objet de notre espérance. Saint Paul écrit aux Philippiens : «  il transformera notre corps de misère en un corps semblable à son corps de gloire ».

Mais cette espérance doit être active. Pour préparer cette transformation, il nous est demandé une reconversion continuelle qui nous permette de passer d’un être trop terrestre à un être vivifié par l’Esprit Saint. C’est ce même mot de « transfigurer » que Paul emploie pour notre effort spirituel : « Ne vous conformez pas au monde présent, mais transfigurez-vous par le renouvellement de votre mentalité pour discerner quelle est la volonté de Dieu… » Rom 12,2

 

Nos efforts ne doivent pas se traduire par la crispation douloureuse de notre volonté, mais par un souci constant de nous remettre sous le regard de Dieu pour répondre à ses appels par un « oui » généreux. Sans doute avons-nous déjà commencé, pendant ces dix premiers jours de Carême, à marcher sur cette route de l’effort grâce à quelques résolutions très simples. Elles doivent, en fait, répondre à cette unique question : comment puis-je ressembler davantage à Jésus ? Et nous pouvons améliorer en pensant à ces trois lignes directrices : notre vie de prière, notre vie de relation aux autres, notre souci de maîtrise de nous-mêmes (irritation, sensualité, paresse…). Redisons que l’effort spirituel, le sacrifice que nous nous imposons généreusement ne doit pas être considéré comme un poids qui nous empêcherait de vivre, mais bien comme un moyen de nous arracher aux esclavages de l’égoïsme, et de nous permettre la vraie liberté spirituelle.

Réconfortés par la contemplation de Jésus transfiguré , poursuivons notre marche vers Pâques pour faire, jour après jour, l’expérience de la joie d’être profondément unis à notre Sauveur. Et nous comprenons les paroles enthousiastes d’un père du Sinaï du 8è siècle, Anastase :

« Qu’y a-t-il de plus heureux, qu’y a-t-il de plus noble que d’être avec Dieu, que d’être transfiguré en Dieu dans la lumière ? »

 

Amen