La cathédrale du Mans
Ce grand vaisseau de pierre où montent les cantiques,
parmi les lourds parfums de cierges et d’encens,
est le témoin muet d’âges éblouissants
dont l’empreinte subsiste au tympan des Portiques.
Depuis qu’en d’autres temps les bâtisseurs antiques,
substituant l’ogive aux vieux cintres romans,
étonnaient l’univers et les cieux cénomans
par l’ardente splendeur des flamboiements gothiques.
Et l’homme de ce siècle, empli d’un saint effroi,
demeure confondu, dès le seuil du beffroi,
croyant revivre, au sein profond des cathédrales,
à l’ombre des piliers d’un galbe sans pareil,
le mystère infini des forêts ancestrales
que perçait à grand’peine un rayon de soleil.
Henri de Germiny, octobre 1948
Les orgues
Dans la pénombre où la prière se blottit,
par ce dimanche intime et grisâtre d’automne,
entre chaque verset des hymnes qu’on entonne,
le chant majestueux des orgues retentit.
Faisant taire en nos cœurs tout vulgaire appétit,
cette hautaine voix rêve, murmure, tonne.
Le plus fier d’entre nous, en l’écoutant, s’étonne
de se sentir soudain si faible et si petit.
L’harmonieux torrent qui, sur nos fronts, s’écroule
dans ses flots surhumains nous emporte et nous roule.
Ainsi la grâce inonde, au jour que Dieu voulut,
l’âme juste de son effusion puissante
et, mi-noyée, aux eaux lustrales du salut,
brise, entraîne et pétrit cette âme obéissante.
René Bardet 1914